Damas-SANA/Une « guerre silencieuse » n’est pas moins dangereuse que les champs de bataille eux-mêmes. Tel est l’état des vestiges de guerre dans de nombreuses régions de Syrie, où des mines terrestres, des bombes à fragmentation et des munitions non explosées tuent des civils et bouleversent la vie de centaines de familles.
Alors que les organisations syriennes et internationales signalent la présence de milliers de ces engins explosifs, ces munitions, plantées par les forces de l’ancien régime sur de vastes zones des gouvernorat syriens, notamment dans la campagne de Damas, la campagne d’Alep, Deraa, Homs et Deir ez-Zor, provoquent des catastrophes humanitaires et environnementales quasi quotidiennes. Parmi les victimes de ces engins explosifs figurent des enfants. Outre les défigurations qui entravent la vie des civils, cette catastrophe laisse des cicatrices difficiles à soigner ou à réparer.
Avertissements internationaux
Le 10 mai, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) a mis en garde contre les dangers continus des mines et des munitions non explosées provenant des restes explosifs de guerre en Syrie, déclarant : « La contamination par des munitions non explosées, des mines, des engins explosifs improvisés et d’autres restes de guerre continue d’avoir des effets mortels dans toute la Syrie après la chute de l’ancien régime ».
Depuis le 8 décembre 2024, le bureau a recensé plus de 900 victimes civiles, dont 367 morts et 542 blessés, le tiers sont des enfants. Le porte-parole adjoint de l’ONU, Farhan Haq, a indiqué lors d’une conférence de presse que l’ONU et ses partenaires continuaient de fournir une assistance dans toute la Syrie, malgré un contexte financier difficile.
En avril 2025, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a mis en garde contre le risque accru de mines et de restes explosifs de guerre pesant sur une grande partie de la population syrienne, appelant à une réponse urgente face à cette menace croissante.
Le chef de la délégation du Comité international de la Croix-Rouge en Syrie, Stéphane Sakalian, a fait savoir que depuis le 8 décembre, la Syrie a connu une augmentation dramatique du nombre des victimes des engins explosifs, enregistrant 748 victimes dont plus de 500 depuis le 1er janvier seulement, contre 912 victimes enregistrées tout au long de l’année 2024.
La Défense civile syrienne
Les volontaires de la Défense civile syrienne affirment que des zones entières des campagnes d’Idleb et à l’Ouest d d’Alep sont devenues des « champs de la mort » et que les efforts de sensibilisation des communautés sont essentiels, mais qu’ils sont entravés par le terrain accidenté et les ressources limitées.
Un rapport publié par la Défense civile le 3 janvier 2025 a indiqué que 25 civils, dont des enfants, ont été tués par l’explosion de restes de guerre et de mines dans différentes régions de Syrie en moins d’un mois.
Un autre rapport a fait noter que 35 civils ont été tués, dont huit enfants et une femme, et 54 autres ont été blessés , dont 23 enfants, par l’explosion de restes de guerre et de mines entre le 27 novembre 2024 et le 10 janvier 2025, indiquant qu’un membre de la Défense civile a retiré plus de 25 000 munitions non explosées, dont plus de 22 500 bombes à fragmentation, depuis le début de ses opérations.
Terres interdites à leur peuple
Ce vestige de guerre a privé des centaines de villageois de travailler dans les terrains agricoles et causé des pertes économiques estimées à des millions de dollars chaque année en raison de l’abstention forcée de l’agriculture et du pâturage, incitant des milliers de familles à s’installer dans des zones moins dangereuses malgré les conditions de vie difficiles qui y règnent.
Les restes explosifs de guerre guettent les civils
Selon la Défense civile, des millions de Syriens vivent dans des zones infestées de mines et d’engins non explosés à cause de bombardements qui ont duré des années, ce qui constitue une menace majeure pour la vie des résidents et affecte directement la stabilité civile, l’éducation et l’agriculture.
De nombreuses victimes sont enregistrées comme atteintes de blessures accidentelles ou décèdent loin des caméras, tandis que les survivants ne trouvent pas de traitement adéquat pour leurs blessures complexes.
Que peut-on faire ?
À la lumière du danger mortel auquel font face les Syriens à chaque pas qu’ils font en raison des vestiges de guerre laissés par l’ancien régime, il n’est pas possible de considérer que la guerre a pris fin, mais plutôt que ses vestiges sont devenus un ennemi qui coût la vie aux Syriens et sème le handicap parmi les générations.
La défense civile et les organisations internationales concernées appellent, dans le cadre de ce qu’on peut agir pour faire face à cette catastrophe, à conjuguer les efforts de sensibilisation communautaire, en particulier dans les villages et sur les champs, à accroître le soutien international pour les équipes de déminage locales ou onusiennes, et à faire pression pour obtenir des cartes précises montrant les emplacements de pose de mines afin de faciliter les opérations de déminage.
R.Khallouf/R.Bittar